2006-06-01

Nicox dans Les Echos

Un article faisant le point sur le parcours de la société, paru aujourd'hui.

Biotechnologies : NicOx, une start-up qui revient de loin

Extraits :
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En dépit du retard accumulé, ce choix se révèle pertinent, car ce candidat médicament est redevenu le produit phare du pipeline de NicOx, qui compte une bonne dizaine de molécules prometteuses. Pour la petite histoire, il faut savoir que le comité scientifique d'AstraZeneca avait voté en faveur de la poursuite de ces recherches. D'ailleurs, Staffan Stromberg, qui était alors le chef du projet au sein du groupe anglo-suédois, a finalement rejoint les rangs de NicOx. Dans la même veine, l'investigateur principal de l'étude clinique mise en cause, le professeur Tom Schnitzer, spécialiste en rhumatologie à la North Western University de Chicago, est devenu entre-temps consultant de NicOx, passant quatre jours par mois à Sophia-Antipolis."
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« Aux Etats-Unis, ce qui prime n'est pas la valeur de votre partenaire pharmaceutique mais la pertinence de votre technologie, ainsi que la portée de vos données scientifiques », explique Michele Garufi. « C'est la clef qui a sauvé NicOx », reconnaît-il. Mais avec une incidence sur l'actionnariat, devenu américain à 70 %, contre 30 % avant l'affaire « AstraZeneca ».
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"Dans quelques mois, nous aurons les résultats de l'étude clinique de phase III de notre produit pour le traitement de l'arthrose. Nous sommes confiants car, même si le risque d'échec n'est jamais exclu, il est aujourd'hui extrêmement minime."
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Fort d'une structure financière assainie, pour ne pas dire confortable, après un placement privé de 45,5 millions d'euros débloqué fin avril, NicOx prépare avec prudence sa transformation de société de R&D en entreprise biopharmaceutique intégrée. Objectif : être opérationnel dans les deux ans. « Nous discutons avec des partenaires potentiels pour partager la commercialisation de notre premier produit. Nous sommes aussi à l'affût d'opportunités de rachat de sociétés et de technologies complémentaires de nos actifs stratégiques », précise Michele Garufi."

Article complet disponible sur le site des Echos

Edit 1er octobre, copie de l'article complet pour archivage :

Avec une technologie prometteuse pour l'industrie pharmaceutique
Biotechnologies : NicOx, une start-up qui revient de loin

Dans le domaine de la recherche sur les anti-inflammatoires, c'est une petite société française qui se trouve aujourd'hui en pole position devant les géants mondiaux de la pharmacie. Pourtant, il y a trois ans, NicOx a failli disparaître. Mais, à force de persévérance, elle a su convaincre de l'intérêt de sa technologie, alors que Merck a dû retirer le Vioxx du marché.

NicOx, qui compte commercialiser ses premiers produits en 2008, a engrangé depuis le début de l'année 17,2 millions d'euros grâce à ses partenariats avec l'industrie pharmaceutique.

Pour soulager un banal mal de tête ou enrayer une fièvre soudaine, tout le monde a avalé, au moins une fois dans sa vie, un comprimé d'aspirine. Sans doute la plus absorbée sur la planète, cette molécule chimique découverte il y a pourtant plus d'un siècle n'a pas encore dévoilé tous les mystères de son mode d'action, notamment en matière de prévention des maladies cardiovasculaires. A l'instar de bien d'autres anti-inflammatoires existants sur lesquels la société française de biotechnologies NicOx a choisi de focaliser ses recherches depuis sa création en 1996. Son objectif : accroître leur efficacité et réduire leurs effets secondaires indésirables pour répondre à des besoins médicaux non satisfaits.

D'une grande simplicité, sa technologie ne manque pourtant pas d'originalité. Le principe ? Il consiste à greffer un groupe donneur d'oxyde nitrique, aux propriétés bénéfiques connues depuis longtemps, sur des médicaments conventionnels, afin de créer de nouvelles entités chimiques brevetables. Quel rôle joue l'oxyde nitrique ? Aujourd'hui, nombre de thèses scientifiques font le lien entre certaines pathologies et les difficultés de l'organisme à produire ce composé en quantité suffisante. D'où l'astuce technologique de NicOx : utiliser un « pont chimique » qui contrôle sa libération continue dans les tissus humains pour éviter les effets néfastes et les problèmes de tolérance liés à une pénétration trop rapide. Fait rarissime dans l'histoire d'une entreprise, le chercheur américain Louis J. Ignarro décrochera le prix Nobel de médecine en 1998, précisément pour ses travaux sur l'oxyde nitrique, alors qu'il est un membre actif du comité scientifique de la start-up française. « Notre atout maître est la richesse de notre technologie et son exploitation possible sur un grand nombre de médicaments existants. Nous avons construit une forte position en matière de propriété intellectuelle, avec pas moins de 1.000 brevets déposés et délivrés autour de l'utilisation de l'oxyde nitrique », estime Eric Castaldi, directeur financier de NicOx.


La leçon d'un échec
L'expérience acquise au fil des dix ans d'existence de la société, qui emploie actuellement 88 personnes, a néanmoins conduit l'équipe dirigeante à cibler des indications thérapeutiques où la libération contrôlée de l'oxyde nitrique est susceptible d'apporter un maximum de bénéfices aux patients tout en minimisant les inconvénients. Aujourd'hui, ses champs d'investigation prioritaires couvrent les pathologies cardiométaboliques et inflamma- toires, qui recèlent un potentiel de marché se chiffrant en milliards de dollars. Un autre critère essentiel guide sa stratégie de recherche : le plan de développement clinique de chaque nouveau composé doit être le moins risqué possible. Avec une règle d'or : le management gardera une main sur chacun de ses produits objet d'un partenariat, en s'appuyant sur ses propres experts scientifiques.

Une leçon tirée de l'échec retentissant de son accord avec AstraZeneca, conclu en 1998, qui lui a valu une descente aux enfers boursiers. En février 2003, le laboratoire anglo-suédois annonce, sans préavis, dans un communiqué laconique, que les résultats de l'étude clinique de phase II du candidat médicament phare de NicOx, dédié au traitement de la douleur aiguë et chronique, ne sont pas satisfaisants. C'est l'électrochoc dans le monde de la biotechnologie française, et même européenne, où la société fait alors figure de valeur sûre avec une capitalisation boursière voisine de 400 millions d'euros. En l'espace de trois jours, sa valorisation fond de 90 % pour tomber à moins de 40 millions d'euros. Soit un montant inférieur à son cash ! « La réaction du marché fut parfaitement irrationnelle, provoquée par un événement dont il n'a retenu que la surface, à l'encontre de toute notion d'analyse d'une société de biotechnologies », estime un expert du secteur.

Cet accident de parcours, qui aurait pu coûter la vie à NicOx, ne laminera pas la détermination de son président fondateur, Michele Garufi (lire ci-contre). Décidé à se battre pour prouver la validité de sa technologie, réhabiliter le produit « incriminé » et revaloriser l'entreprise par respect pour ses employés et ses actionnaires, il fera appel à un panel d'experts indépendants, qui invalidera les données cliniques publiées par AstraZeneca. Fort de sa conviction scientifiquement démontrée, il décidera, à l'automne 2003, de récupérer tous les droits sur ce produit pour reprendre en main son développement avec ses propres moyens.

En dépit du retard accumulé, ce choix se révèle pertinent, car ce candidat médicament est redevenu le produit phare du pipeline de NicOx, qui compte une bonne dizaine de molécules prometteuses. Pour la petite histoire, il faut savoir que le comité scientifique d'AstraZeneca avait voté en faveur de la poursuite de ces recherches. D'ailleurs, Staffan Stromberg, qui était alors le chef du projet au sein du groupe anglo-suédois, a finalement rejoint les rangs de NicOx. Dans la même veine, l'investigateur principal de l'étude clinique mise en cause, le professeur Tom Schnitzer, spécialiste en rhumatologie à la North Western University de Chicago, est devenu entre-temps consultant de NicOx, passant quatre jours par mois à Sophia-Antipolis.


Un optimisme inoxydable
Comment remonter la pente ou, tout simplement, survivre, quand, du jour au lendemain, personne ou presque n'est plus prêt à parier un euro sur l'avenir de NicOx, qui entre alors dans une longue période de convalescence ? Le meilleur remède : la rigueur du management. « En dépit de la difficulté de la situation, l'équipe dirigeante a continué à exécuter son modèle de développement et à appliquer sa technologie sans dévier de sa ligne stratégique et sans se laisser disperser », estime le président d'un grand laboratoire pharmaceutique français. Une persévérance qui sera payante un an plus tard. Alors que les investisseurs institutionnels lui ont tourné le dos en Europe, la société réussit, en septembre 2004, une levée de fonds privée de 26 millions d'euros. « Aux Etats-Unis, ce qui prime n'est pas la valeur de votre partenaire pharmaceutique mais la pertinence de votre technologie, ainsi que la portée de vos données scientifiques », explique Michele Garufi. « C'est la clef qui a sauvé NicOx », reconnaît-il. Mais avec une incidence sur l'actionnariat, devenu américain à 70 %, contre 30 % avant l'affaire « AstraZeneca ». Pendant cette période critique, l'optimisme inoxydable du président de NicOx préservera le personnel de toute inquiétude démesurée.

Heureuse coïncidence cette fois pour la société de biotechnologies, au moment où elle amorce sa sortie de l'ornière financière, le groupe pharmaceutique Merck annonce le retrait du marché de son anti-inflammatoire Vioxx, en raison des risques cardio-vasculaires qu'il fait courir aux patients hypertendus. Plusieurs autres produits de la même classe thérapeutique, appelés « inhibiteurs de COX2 », seront aussi touchés. Toujours est-il que cette remise en cause confère une caution scientifique supplémentaire à la technologie de NicOx. « C'est la thèse que nous avons défendue depuis le début, rappelle Michele Garufi. Dans quelques mois, nous aurons les résultats de l'étude clinique de phase III de notre produit pour le traitement de l'arthrose. Nous sommes confiants car, même si le risque d'échec n'est jamais exclu, il est aujourd'hui extrêmement minime. » D'autant que, en même temps, devraient être rendues publiques les conclusions d'un essai clinique complémentaire, qui vient tout juste d'être lancé aux Etats-Unis. L'objectif est précisément de démontrer que, à la différence des agents anti-inflammatoires administrés aujourd'hui pour le traitement de l'arthrose, le candidat médicament de NicOx n'augmente pas la pression artérielle des patients.


Accords majeurs avec Pfizer et Merck
Dans un tel contexte, la situation s'inverse au profit de NicOx, qui se retrouve, en quelque sorte, en pole position devant les grands groupes pharmaceutiques. Les deux leaders mondiaux, Pfizer et Merck, l'ont bien compris. « Comme les fonds américains, ils nous ont fait confiance. Depuis plus de deux ans, nous avions engagé une collaboration avec chacun d'eux, car ils souhaitaientévaluer notre technologie. » Sur la base de deux accords mineurs, d'ailleurs très peu rémunérés, que les équipes de NicOx ont honorés comme un investissement sur l'avenir. Pari gagné : deux accords, d'une valeur unitaire de 300 millions d'euros à terme, sont tombés coup sur coup au mois de mars. Le leader mondial Pfizer a signé un contrat qui lui octroie les droits exclusifs pour l'utilisation de la technologie de libération d'oxyde nitrique couvrant tout le champ thérapeutique de l'ophtalmologie. Et le groupe Merck a pris position sur le développement de nouveaux hypertenseurs, compte tenu des résultats prometteurs de sa première expérience avec NicOx. « C'est le signal fort que le marché attendait pour restaurer son capital confiance vis-à-vis de la société. Sa sensibilité est exacerbée dans un sens comme dans l'autre », estime un analyste. De fait, en quelques semaines, la capitalisation de NicOx explose de 110 à 400 millions d'euros.

Fort d'une structure financière assainie, pour ne pas dire confortable, après un placement privé de 45,5 millions d'euros débloqué fin avril, NicOx prépare avec prudence sa transformation de société de R&D en entreprise biopharmaceutique intégrée. Objectif : être opérationnel dans les deux ans. « Nous discutons avec des partenaires potentiels pour partager la commercialisation de notre premier produit. Nous sommes aussi à l'affût d'opportunités de rachat de sociétés et de technologies complémentaires de nos actifs stratégiques », précise Michele Garufi. « Si nous parvenons à nos fins, NicOx peut devenir l'équivalent européen d'Amgen aux Etats-Unis », répète-t-il depuis le début de cette aventure. Pour mettre toutes les chances de réussite du côté de son partenaire, le groupe américain Pfizer va lui donner un coup de pouce supplémentaire. Son arrivée dans le capital, à hauteur de 15 millions d'euros, devrait être entérinée aujourd'hui par l'assemblée générale réunie à Sophia-Antipolis.


Les étapes clefs du financement
2 millions d'euros : première levée de fonds privés en janvier 1996.
6,3 millions d'euros : seconde levée de fonds privés en décembre 1997.
33,2 millions d'euros : montant de l'introduction en Bourse, à Paris, en novembre 1999.
59,3 millions d'euros : offre publique secondaire sur Euronext Paris, en mai 2001.
26 millions d'euros : premier placement privé souscrit par des investisseurs institutionnels en septembre 2004.
45,5 millions d'euros : second placement privé en avril 2006.


à propos de Michele Garuffi :

Son regard profond en dit long sur sa détermination. Ce trait de caractère dominant du président fondateur de NicOx, la cinquantaine passée, a eu raison de toutes les résistances qui auraient pu l'empêcher de parvenir à ses fins. « Je me souviens d'une séance fabuleuse lors de l'introduction en Bourse à Paris, le 2 novembre 1999, qui a bien failli rater car les investisseurs institutionnels ne comprenaient rien au «business model». Pour lui, il était hors de question de baisser les bras », raconte Denis Lucquin, partenaire de Sofinnova Partners et premier financier français à avoir rencontré Michele Garufi, en 1994. Cinq ans plus tard, cet esprit agile était déjà à cent lieux « de son premier business plan, qui n'était ni fait ni à faire », se souvient Denis Lucquin. Deux autres capital-risqueurs, Laurent Ganem, d'Apax Partners, et Bernard Daugeras, d'Auriga Partners, sont venus lui prêter main forte pour lancer la start-up en janvier 1996.

« Sur le plan professionnel, je dois tout à la France, l'Italie ne m'a pas aidé quand j'ai décidé de créer mon entreprise », reconnaît volontiers Michele Garufi. Pourtant, viscéralement attaché à sa terre natale, il choisira de construire, en 2001, un centre derecherche à Bresso, dans les faubourgs de Milan, le berceau de son projet. En Italie, il déplore la corruption politique et fuit les mondanités : « Je n'arrive pas à m'intégrer dans certains circuits, même si c'est parfois utile pour le business », confesse-t-il.

Depuis le début de cette aventure, Michele Garufi n'a changé ni ses habitudes, ni son cercle d'amis, ni son style de vie. Certes, l'habit ne fait pas l'habileté du manager. La preuve, sa panoplie d'entrepreneur préférée est composée d'un blouson, d'un jean et d'un scooter. C'est la tenue qu'il a adoptée, faute de moyens, il y a dix ans, quand il a laissé momentanément au vestiaire le costume confectionné sur mesure par un tailleur italien et la cravate Hermès qu'il portait lorsqu'il était vice-président de la division internationale du laboratoire pharmaceutique Recordati. « Il est resté fidèle à lui-même, possède un sens aigu de ses responsabilités vis-à-vis de son personnel, qu'il considère comme aussi méritant que le management », dit-on dans son entourage.

Optimiste né, jamais déprimé ni survolté, « il se montre lucide à chaque étape franchie en répétant que ce n'est pas une garantie de succès ». Michele Garufi sera fier de sa vie professionnelle seulement le jour où il tiendra dans ses mains une boîte de médicaments estampillée NicOx.

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