2007-09-03

Impact deals biotechs chez NicOx

Expertise
"Il faut équilibrer deals flexibles à revenus limités et cessions lucratives"

NicOx fait partie des rares biotech françaises à avoir intégré un VP Alliance Management. Cette décision s'est imposée au fil des partenariats conclus par l'entreprise, qui est parvenue ainsi à construire une stratégie collaborative juridique, financière et scientifique très solide. Damian Marron, vice-président du Corporate Development chez NicOx, apporte son éclairage sur les tenants et aboutissants ainsi que sur les potentiels de son organisation dans le cadre de cette fonction.

Biotech Finances : Quelle est votre vision de l'apport des deals pour la biotech que vous représentez ?
Damian Marron : Les alliances multiples et diversifiées sont l'une des clés du succès du développement des produits. Cela nous apporte des expertises, dans le domaine de la R&D mais également pour l'enregistrement et la commercialisation future des médicaments issus de la collaboration. Ces opérations offrent aussi des ressources financières supplémentaires ainsi qu'une validation de nos technologies et une reconnaissance de premier plan. Ces atouts irremplaçables sont ensuite de véritables leviers qui nous ouvrent les portes vers de nouveaux investisseurs pour les engager dans un tour de table, par exemple.

Biotech Finances : Comment procédez-vous pour trouver les partenaires idéals ? De quelle manière organisez-vous la prospection commerciale de vos futurs partenaires ?
D.M. : Nous nous déplaçons beaucoup sur les conférences et les conventions d'affaires. Avec un événement quasiment tous les mois, nous avons la possibilité de rencontrer beaucoup de sociétés en très peu de temps. Les rendez-vous qui sont organisés sur place et les rencontres fortuites nous permettent de savoir rapidement si nous avons des intérêts communs avec notre interlocuteur. Dans le cas d'un premier entretien positif, nous nous revoyons plus longuement en dehors de la conférence quelques semaines après et commençons à réfléchir aux modalités de l'éventuel deal. Nous ne pouvons certes pas participer à tous les meetings mais nous nous fixons au moins quatre rendez-vous par an, deux en Europe et deux aux États-Unis. Il arrive également que certaines sociétés nous contactent directement pour nous proposer un deal, c'est souvent l'occasion de saisir des opportunités intéressantes.

Biotech Finances : Pourquoi avoir créé un poste de VP Alliance et quels sont les paramètres économiques d'une telle décision ?
D.M. : Au fil du temps et des partenariats, nous avons noté qu'il y avait de nombreux points communs entre les différents contrats mais qu'il y avait des choses à faire et d'autres à éviter. Les big pharmas ont toutes un responsable de la gestion des deals alors que les biotech, elles, laissent bien souvent de côté cette mission clé et très créatrice de valeur. Le docteur Gavin Spencer, qui a la charge de ce poste chez NicOx, a pour rôle de provoquer, maintenir, gérer et nourrir les relations que nous entretenons avec nos partenaires. Il travaille pour le moment avec deux collaborateurs, et sera rejoint par une troisième personne dans les prochains mois. Gérer 7 partenariats noués avec 6 sociétés différentes nécessite en effet un important travail.

Biotech Finances : Comment conserver sa liberté tout en nouant des alliances ?
D.M. : Les sociétés grandissent et les changements d'orientation peuvent effectivement nécessiter une réorganisation des partenariats. Il est toutefois très délicat de renégocier un contrat. Cela n'est d'ailleurs réellement envisageable que dans le cas où l'alliance ne progresse pas comme on le souhaite. Pour s'assurer d'une flexibilité salutaire, il est important de préparer le terrain dès l'élaboration du term sheet en prévoyant des clauses optionnelles. Dans l'accord que nous avons signé avec Merck & Co (1), nous avons par exemple mis en place un droit de copromotion. Cela nous permettra, si nous le souhaitons et si nous avons les ressources nécessaires à l'échéance, de nous impliquer dans la commercialisation de notre produit. Ces arrangements limitent toutefois les revenus, il est donc judicieux d'équilibrer, selon ses priorités, des cessions classiques de licences et des contrats plus ouverts avec des droits croisés.

Biotech Finances : Quelles sont les bases d'un bon deal ?
D.M. : Avant toute chose, il faut bien être sûr de partager une vision commune de ce que les produits devront être à l'issue du partenariat. Pour cela, il est important de présenter de bonnes données, fiables, et qui montrent que ce dont on dispose donnera naissance à des composés d'intérêts. Une bonne PI est également nécessaire pour contourner les désarrois juridiques. Pour éviter d'avoir des déconvenues, nous effectuons un benchmarking consciencieux avec plusieurs consultants qui nous mettent au fait des normes actuelles dans le domaine qui nous intéresse. Pour chaque contrat, nous prenons l'avis d'un minimum de deux à trois consultants ou seniors récemment retraités de la pharma. Le but est de tenter de comprendre le point de vue de l'acteur avec qui l'on va signer. Il n'existe toutefois pas d'assurance en tant que telle pour une alliance. Un contrat bien ficelé et un bon relationnel sont les meilleures clés du succès.

Biotech Finances : Les montants mis en jeu dans les deals sont en forte croissance depuis plusieurs mois; comment percevez-vous cela sur le terrain ? Expliquez-nous la manière dont se forgent les montants des deals ?
D.M. : Les enveloppes des partenariats s'envolent en effet de plus en plus pour atteindre des sommets. Il n'y a pour le moment aucun signe d'arrêt de cette croissance, mais la logique laisse imaginer que les montants devraient bientôt cesser d'augmenter afin que ces opérations restent rentables pour les pharmas. Au niveau des termes financiers, on voit aujourd'hui beaucoup de choses même si la plupart des transactions restent confidentielles. Les modèles se ressemblent toutefois beaucoup et l'on retrouve quasi systématiquement trois points d'ancrage : un upfront payment, soit en cash soit sous la forme d'une prise de participation, des versements d'étapes ainsi que des royalties sur les ventes dont les montants diffèrent selon l'implication ou non des deux partenaires dans la commercialisation.

Biotech Finances : Certains acteurs sont-ils réputés pour payer plus que d'autres ?
D.M. : Oui, il est évident que certains laboratoires sont prêts à payer plus, mais ce qui est le plus important ce n'est pas l'argent sur la table mais les termes de la collaboration. Avoir la même vision sur un produit, être prêt à investir et à donner le meilleur sont des bases bien plus importantes qu'une somme libérée. Dans cette idée, les deals biotech-biotech ou biotech-specialty pharmas ne sont pas moins intéressants que ceux conclus avec des big pharmas. Dans le cas d'une alliance large, avec un grand laboratoire, ladite collaboration est une parmi des centaines. Le risque de voir suspendre son contrat est bien plus important que dans le cadre d'un partenariat avec une structure plus petite pour qui cette transaction sera fondatrice.

Biotech Finances : Une récente étude du cabinet de conseil Alcimed a démontré que les deals early-stage ont le vent en poupe (2). Pensez-vous qu'ils soient source d'avenir pour les petits opérateurs biotech ?
D.M. : Le modèle classique consistait jusqu'à présent à nouer des alliances une fois la preuve de concept clinique obtenue. Nous avons toutefois vu un changement important dans les stratégies et les mentalités ces dernières années. Les big pharmas sont aujourd'hui prêtes à investir beaucoup plus précocement. Cela est très avantageux pour les biotech pour qui mener un produit jusqu'en phase II est très coûteux et risqué. Il n'y a en effet pas que la preuve de concept clinique pour être sûr de signer un bon deal. Il faut être convaincant et pour ce faire disposer de nombreuses études parallèles, que les finances serrées des acteurs biotech limitent en général. Il est parfois plus long que prévu pour une pharma de réaliser des études qu'une biotech n'a pas réalisées faute de moyens. Sur le plan financier, les transactions précoces sont très intéressantes. Un laboratoire paye aujourd'hui pour des produits précliniques ce qu'il investissait il y a cinq ans pour acquérir un composé clinique avancé.

LES PARTENARIATS EN COURS CHEZ NICOX
Nom de la société Pays Date d'initiation Domaine de collaboration
Axcan Pharma Inc. Canada Mai 2002 Hypertension portale
Biolipox AB Suède Juin 2001 Rhinites allergiques
Topigen Canada Octobre 2005 Broncho pneumopathies
Pharmaceuticals Inc. & & chroniques obstructives (BPCO) / Asthme
Ferrer Grupo Internacional Espagne Avril 2004 Dermatologie
Pfizer États-Unis Mars 2006 Ophtalmologie
Merck & Co, Inc. États-Unis Mars 2006 Cardiovasculaire

(1) - Lire « NicOx franchit un premier milestone dans sa collaboration avec Merck » dans le n° 317 de BF du 29/01/2007 (2) - Lire « Deals early-stage : les biotech consolident leurs positions de moteur d'innovation » dans le n°335 de BF du 11/06/2007

Propos recueillis par Juliette Lemaignen

© Bf n°341 du 27/08/2007

Lire aussi :
Deals early-stage : les biotech consolident leurs positions de moteur d'innovation (Lettre n°335 du 11/06/2007)
Entreprises citées
NicOx
Merck & Co

Acteurs
Damian Marron
Gavin Spencer

trouvé sur Boursorama, posté par pwelcome (merci à lui pour cette trouvaille)

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